• Installation vidéo sans titre
    Pierre-Yves Boisramé

Installation vidéo sans titre-Panorama 14

  • DESCRIPTION

    Je suis dans un train, mon œil voit le mouvement, celui du train voisin que je dépasse, mon corps ressent les premières vibrations inhérentes au démarrage, je scrute la vitre dans l'attente de voir s'effacer les wagons, défiler le paysage. Mais c'est le train voisin qui vient d'amorcer sa trajectoire et qui laisse mon corps soudain déstabilisé.

    Ici, un téléphérique cerné par trois écrans. La fixité de l'un rencontre la trajectoire qu'indiquent les autres. Paysage qui se balance au rythme du mouvement cahotant de la cabine. La présence spectrale de celle-ci – transparence de la matière, dont le reflet n'apparaît que diffus – vient se propager sur les écrans, quand la cabine se fait elle-même réceptacle de la projection du déplacement. Réversibilité étrange, c'est l'instance immuable, la montagne, qui se meut quand l'objet destiné au déplacement reste à l'arrêt. L'origine du mouvement se perd dans un ensemble à la fois instable et fixe.

    Car nous sommes bien face à un ensemble, dont les paradoxes n'empêchent pas la cohérence de la totalité. La démarche de Pierre-Yves Boisramé évolue vers un rapport au spectateur moins explicite : celui-ci semble ici extérieur à l'installation. C'est une échelle indéfinie, une distance ambiguë, qu'expérimente celui qui regarde, dans la mesure où le dispositif technique s'affiche comme tel sans prendre valeur de contrepoint. Tout comme le mouvement et l'arrêt, l'image et le dispositif qui la génère fusionnent pour faire s'entremêler des sensations contradictoires. Deux échelles se croisent. Et c'est précisément à ce point d'intersection que se produit quelque chose de vraisemblable. Il ne s'agit plus alors de démêler les valeurs et les impressions, mais d'accepter l'ambiguïté de l'artefact, de s'y perdre en toute conscience.
    Diane Moquet-Hidalgo